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Auteur/autrice : opusagaunum

Une découverte de plus de 300 ans

Une découverte de plus de 300 ans

Il y a un peu moins de 350 ans, le 17 juin 1668, sollicité par l’évêque de Sion Adrien IV de Riedmatten, l’abbé Jean-Jodoc Quartéry procédait en sa présence à l’ouverture de la Grande châsse de saint Maurice. Nous avons conservé deux compte-rendus de cette visite, tous deux rédigés par des témoins de l’événement, le premier  par un chanoine de Sion, Christian Ritteler, le second par l’abbé de Saint-Maurice en personne. A cette époque, on découvre une étiquette de relique, authentifiant les reliques Maurice (ill. 1), ainsi qu’une note rapportant la répartition des reliques du saint entre le duc de Savoie et l’abbaye, advenue à la fin de l’année 1590 (ces deux parchemins sont aujourd’hui conservés aux archives abbatiales, sous les cotes CHN, 64/1/27 et 28 respectivement).

Jean-Jodoc Quartéry compte les ossements présents dans la châsse, qu’il distingue en majeurs et mineurs, indique qu’il a récolté les cendres et les poussières pour les déposer dans une pyxide d’argent qu’il avait lui-même donnée à cet effet (ill. 2), et mentionne enfin des clous. Lors de l’ouverture de la boîte métallique et du sachet de velours retrouvés dans la châsse, Monseigneur Jean Scarcella a pu constater que son prédécesseur de l’époque baroque avait tout juste (ill. 3) !

Deux petits trous

Deux petits trous

Une fois déposé l’ensemble des plaques métalliques qui recouvraient le pignon de la Vierge, celui-ci a révélé la présence de deux orifices circulaires (ill.1).Le premier, situé au sommet de la planche sous le faîte du toit, est obstrué par un bouchon de bois, sans doute de mélèze, et a été percé mécaniquement; le second, dont le bouchon est tombé dans la châsse lors des travaux, occupe, à mi-hauteur sur la gauche, la place d’un noeud dans la planche, mais a très vraisemblablement été agrandi de façon mécanique. Nous ignorons pour l’heure la fonction de ces deux trous. Profitant de cette ouverture, nous avons souhaité regarder ce que contenait la châsse à l’aide d’un endoscope (ill.2).

Cette première intrusion a permis de retrouver un sachet de velours contenant des reliques, connu par ailleurs, et d’identifier la présence d’une boîte en métal (étain ou plomb), qui devrait également contenir des reliques (ill.3). Nous saurons plus tard si cette boîte passe par la petite trappe située sous la châsse; dans le cas contraire, nous aurions peut-être une preuve indirecte de la présence d’une porte plus grande, désormais invisible ou tout simplement condamnée. D’autres observations ont été faites, qui demandent encore une vérification.

Des conditions économiques difficiles

Des conditions économiques difficiles

La dépose du relief de la Vierge et des plaquettes niellées disposées autour d’elle, à la manière d’une auréole, est achevée. L’étude du pignon offre tout un ensemble d’intéressantes observations, qui permettent d’orienter les recherches à venir. Par la découpe et la disposition des plaques d’argent qui couvrent la planche de fond en mélèze, on peut affirmer que l’orfèvre travaille de manière parcimonieuse, utilisant le matériau disponible sans excès ni perte inutiles (photo 1). Par ailleurs, le nombre très impressionnant de trous de clous relevés sur la plaque de la Vierge (une septantaine, alors qu’elle était fixée à l’âme à l’aide de vingt clous seulement), est le signe d’un remploi; cela est confirmé par la première observation des plaquettes niellées ornées d’une inscription qui, mises bout à bout, forment un arc de cercle (photo 2). De plus, une plaquette d’argent ornementale a été découpée pour former deux éléments de décor du trône de la Vierge. Ces indices, à notre sens concomitants, témoignent des conditions économiques difficiles au moment de la création de la Grande châsse de saint Maurice, comme elles l’étaient au début du XIIIe siècle.

Un nouveau mystère

Un nouveau mystère

Au revers de la plaque d’argent de la Vierge, déposée ce jour, les restaurateurs ont trouvé de quoi rendre le mystère de cette châsse encore plus épais: une lettre gravée, suivie d’une chiffre apparemment. Serait-ce la marque laissée par l’orfèvre qui est intervenu sur cette même plaque dans le passé?

Un premier clou en argent!

Un premier clou en argent!

Les travaux de restauration de la Grande châsse de saint Maurice ont débuté ce jour. Denise Witschard, conservatrice-restauratrice du trésor abbatial, accompagnée de son successeur désigné Romain Jeanneret (qu’elle forme à la restauration des objets d’orfèvrerie complexes) a ôté le premier de plus de mille clous qui fixent les plaques d’argent sur l’âme en bois de la châsse. Ce moment solennel s’est déroulé en présence du procureur de l’Abbaye, le chanoine Olivier Roduit, directeur des collections abbatiales, du prieur Roland Jaquenoud, des chanoines Thomas Rödder et Cyrille Rieder, ainsi que du conservateur du trésor Pierre Alain Mariaux et de l’archiviste Germain Hausmann.